[5] hiver 2012-2013
Liban, mémoire en déshérence
[5] pages 3-8

Fragilité des mots. Demain, peut-être faudra-t-il les effacer. Ils ­reflètent ma vision du Liban, pays de mes parents. Je ne cherche pas à fixer quoi que ce soit. Demain, tout sera peut-être contredit, à commencer par mon propre rapport au pays. Toujours l’impression de passer à côté de l’essentiel. Comme si je n’avais jamais réussi à réellement pénétrer tous les livres que j’avais parcourus. Littérature inaccessible. Comme un secret nécessaire qu’on ne me confierait pas. Les «tu comprendras plus tard» que je n’ai toujours pas compris.
Cynthia Khattar, Noha Mokhtar
Portraits libanais
[5] pages 10-11

À Beyrouth, la Fondation arabe pour l’image inventorie et interroge la mémoire du Moyen-Orient et du Maghreb.
Jean Perret
Les mecs d’à côté
[5] pages 13-17

Nous sommes aux abords de la ville. Là où Beyrouth rejette ceux que, par mépris ou dégoût, elle préfère ne pas côtoyer de trop près dans ses rues respectables d’Achrafieh. Une zone plutôt industrielle, proche de Bourj Hammoud, de Nabaa et du grand rond-point de Daoura, où chaque matin Syriens ou Sri Lankais s’accroupissent, attendant d’être embauchés sur un chantier pour la journée. Le Beyrouth pas bling-bling.
Cynthia Khattar, Noha Mokhtar
 
La mer encore
[5] page 19

L’aiguille de ma boussole intérieure indique l’Est. Mais d’où me vient cette excitation quand je vois une allée d’acacias, une bande de basses terres, une place comme un foulard, bordée de maisons à un étage. Quelque chose me crie: ici. Et aucun nom ne parvient à s’approcher de cette image. L’image est ancrée derrière toute expérience consciente. Elle provient d’un réservoir de la mémoire que je ne contrôle, ni ne connais vraiment. Et elle exerce un pouvoir sur moi.
> La mer encore (Editions d’en bas)
Ilma Rakusa
 
Chroniques allemandes
[5] page 20

Cher lecteur de 1985,
Je ne sais quel hasard te fait fouiller dans ta bibliothèque, tu tombes sur ma Mona Lisa, tu t’arrêtes, tu lis. Je suis dans mes petits souliers: tu as un costume d’une mode bien différente de celle de mon époque, et ton cerveau aussi, tu le portes tout autrement… Je refais trois fois mon début: un thème différent chaque fois, il faut bien trouver le contact… Et chaque fois, j’abandonne – nous ne nous comprenons vraiment pas. Je suis trop petit, c’est sûr: j’en ai jusqu’aux yeux, de mon temps, ma tête arrive à peine à en dépasser la surface… voilà, je le savais: ton sourire m’accable.
> Moment d’angoisse chez les riches (Éditions Héros-Limite)
Kurt Tucholsky
Une manière d’habiter le monde
[5] pages 21-27

Eternal Tour, festival nomade mélangeant arts et sciences, a connu sa première édition à Rome en 2008. D’autres étapes ont suivi: Neuchâtel en 2009, Jérusalem et Ramallah en 2010, de New York à Las Vegas en 2011, Genève et São Paulo en 2012. Comment établir, a posteriori, une cartographie de ce projet, porté par une multitude de regards? Les images récoltées ici pour La Couleur des jours sont botaniques et minérales. De l’assemblage de villes et de lieux, d’éléments et d’espaces, émerge un paysage, un monde, un terrain, repensé, ressenti, investi.
Donatella Bernardi, Noémie Etienne
Comment j’ai appris à écrire
[5] pages 30-31

Quand j’ai commencé à étudier l’architecture, je n’avais jamais dessiné une maison. Je n’étais jamais allé dans une agence, rarement sur un chantier. Je n’avais aucune idée de la ma­nière dont une simple porte était faite. J’étais maladroit de mes mains, mauvais en dessin comme en bricolage.
> Écrire la mondialité (Éditions La Baconnière)
Daniel de Roulet
Le Portugal, du Léman au lac Majeur
[5] page 32

Un lien particulier s’est tissé, depuis les années 30 déjà, entre le cinéma portugais et la Suisse.
Chicca Bergonzi
Un cinéma plus grand que la vie
[5] page 33

Admettons que le cinéma, ce soit la nostalgie d’une époque que nous n’aurions pas vécue. Gageons qu’un film, c’est du temps sur de l’espace contracté par de la lumière. Dans l’artificialité de ce condensé réside quelque chose de profondément humain: notre envie de conquête. Si l’on admet les postulats précités, connaît-on un pays plus propice au cinéma que le Portugal?
Lionel Baier
Le sacré, questions profanes
[5] pages 35-37

«Ce qu’il reste quand tout est perdu.» Cette définition du sacré souvent reprise n’est ni d’un grand anthropologue ni d’un grand historien des religions, mais d’un artiste, le peintre et sculpteur normand Philippe Garel. C’est une définition optimiste puisque cela signifie qu’on ne pourra jamais tout perdre.
Élisabeth Chardon
Portraits d’arbres
[5] pages 38-39

Jacques Bélat
 
Chronique
Jean-Louis Boissier, Mathieu Menghini, Jérôme Stettler
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